La Petite Histoire Des Grandes Expressions

« Une bérézina », « épater la galerie », « sur la sellette », « mettre sa main au feu », « l’argent n’a pas d’odeur »… Ces expressions sont devenues si courantes dans notre langage qu’on en a souvent oublié l’origine. Et c’est bien dommage, car ces pastilles historiques distillent, dans la conversation la plus banale, de brèves leçons de mémoire… Séance de rattrapage.

BANQUEROUTE > Faillite retentissante, échec total

L’origine du terme peut être retracée à la Renaissance italienne. A l’époque, plusieurs monnaies régionales cohabitent : deniers, livres et écus doivent être échangés contre la devise locale aux abords des grandes foires. Ainsi apparaît le métier de changeur, dont la fonction est d’échanger, moyennant commission, les devises étrangères contre une monnaie valable. Cet ancêtre de nos banquiers est repérable de loin au coffre de la forme d’un banc qui renferme ses liquidités ! Toutefois, si ce professionnel de la finance s’avère insolvable ou indigne de confiance, les autorités brisent le précieux « banc » qui fait toute sa réputation. Ainsi apparaît en italien le terme banca rotta, littéralement « banc rompu », qui glisse vers le français en « banqueroute » !

USURE. Cette miniature, issue d’un manuscrit du XIVe siècle, détaille des banquiers italiens comptant leurs dépôts. A l’époque, le prêt à usure, défendu aux Chrétiens, est pratiqué notamment par les Juifs : de là provient l’association tenace entre le peuple hébreu et l’argent… (Credit: Wikipedia/Domaine public)

BÂTIR DES CHÂTEAUX EN ESPAGNE > Nourrir des espoirs illusoires

Synonyme de projets merveilleux mais souvent déçus, cette expression entre dans le langage courant vers le XVIe siècle. Elle serait issue de la Reconquista, phase de reprise progressive de la péninsule ibérique par les Chrétiens à partir du XIe siècle. Partis du nord, les puissants d’Espagne en chassent les Berbères, défendant les terres chèrement gagnées par un rideau de citadelles. Les vastes plaines ibériques sont à l’époque dépeuplées et vides de châteaux : les Musulmans ne peuvent s’y réfugier pour ralentir leur débâcle… Soit parce que l’absence de forteresses est criante, soit parce que leur construction est fulgurante, l’expression « bâtir des châteaux en Espagne » prend rapidement le sens d’un projet vain, irréalisable.

BÉRÉZINA > Déroute, déculottée

Ce nom commun, qui a fini par désigner une défaite cuisante, tire son nom d’une bataille napoléonienne donnée à la fin de l’année 1812. La Grande Armée vient de quitter Moscou. Elle fait peine à voir : les hussards sont mangés vivants par le typhus, les privations et la morsure de l’hiver russe (les températures avoisinent -30°C). Fin novembre, Napoléon, qui marche à la tête d’une armée amoindrie, apprend que l’arrière-garde russe s’est reformée et compte le surprendre sur les rives de la rivière Bérézina, en actuelle Biélorussie. Au prix de terribles pertes, le Petit Caporal parvient à s’arracher de l’étau russe et à traverser la rivière glacée… Bien qu’il s’agisse d’une victoire militaire, la Bérézina finira par désigner, dans les dictionnaires, une débâcle tant la retraite de Russie fut calamiteuse.

COUP DE FROID. Napoléon marche à la tête de 15% des effectifs engagés lorsqu’il franchit le fleuve Niémen dans le sens du retour. Le reste a été vaincu par les harcèlements de l’armée cosaque, le typhus, la dysenterie, les privations, mais surtout le « Général Hiver » russe… (Tableau d’Illarian Prianichnikov, 1874 via Wikipedia/Domaine public)

COMPTER POUR DES PRUNES > Ne rien valoir, être vain

Dès le XIIIe siècle, on dit qu’une chose « ne vaut prune » pour signifier qu’elle n’a aucune valeur, tandis que le mot « prune » désigne tantôt une aubaine, tantôt une malchance – généralement un coup du sort. D’où vient l’expression « compter pour des prunes » ? Selon certains, elle serait née lors de la Deuxième Croisade, prêchée en 1146 et soutenue par la majorité des souverains chrétiens d’Occident. Mais l’expédition tourne vite au fiasco : les Croisés s’entre-déchirent et ne remportent aucune victoire en Terre Sainte. Penauds, ils rentrent au pays trois ans plus tard après l’échec du siège de Damas… Seule consolation, ils rapportent dans leurs bagages des pieds de pruniers syriens qui donneront des fruits gorgés de soleil. Les chevaliers d’Occident seront donc allés guerroyer « pour des prunes »… Autrement dit, pour presque rien !

CORDON BLEU > Fin cuisinier

Avant de qualifier une escalope panée ou un cuisinier de renom, le terme désigne les membres d’un ordre de chevalerie constitué par Henri III. En 1578, dans le tumulte des guerres de religion, le souverain fonde l’Ordre du Saint-Esprit afin de lutter contre l’hérésie protestante. Ses chevaliers sont reconnus par un insigne particulier : une croix de Malte épinglée à l’habit au bout d’un ruban bleu. Décoration suprême de l’aristocratie française, elle est synonyme d’honneur et de prestige. Si le qualificatif glisse progressivement vers la gastronomie, c’est parce que les « cordons bleus » de l’Ordre ont pris l’habitude de donner des soupers fins… Ainsi le terme deviendra synonyme de gourmet, puis de cuisinier ou cuisinière émérite au XIXe siècle.

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DRACONIEN > Rigoureux, drastique, d’une excessive sévérité

Le législateur athénien Dracon établit, vers 621 avant notre ère, un corpus de lois extrêmement sévères : les délits mineurs – notamment le vol – y sont punis par la mort ou l’ostracisation. On dira plus tard du code Dracon qu’il fut « écrit non avec de l’encre, mais avec du sang ». Et pourtant, son objectif est louable : décourager les vengeances privées, qui supplantent à l’époque un système judiciaire encore bégayant et privent les pauvres de leurs droits… Son successeur, Solon, abrogera la plupart des lois « draconiennes » au Ve siècle av. J.-C. pour des mesures plus tempérées, jetant à Athènes les bases de la démocratie. Quant à Dracon, on ignore ce qu’il est devenu : mort en exil pour les uns, on raconte qu’il fut étouffé par le poids des offrandes qui lui furent données sur la scène d’un théâtre.

L’ESPRIT DES LOIS. Au VIe siècle av. J.-C., le législateur grec Charondas souhaite pacifier le débat public. Il interdit donc aux individus se présentant sur l’agora de porter une arme… Mais un jour qu’il se mêle à une foule en colère, il oublie qu’il porte lui-même une épée au côté ! Lorsqu’un homme lui reproche de violer sa propre loi, Charondas répond : « au contraire, je prétends la confirmer ». Et il s’enfonce son épée dans le cœur… (Tableau de Philipp Foltz, 1852 via Wikimedia/Domaine public)

ÉPATER LA GALERIE > Impressionner, fanfaronner

Sous l’Ancien Régime, le jeu de paume est un sport très populaire qui a notamment la faveur des rois de France. Il s’exportera outre-Manche pour devenir tennis – ce mot étant une déformation du français « tenez » lancé par un paumier avant de servir la balle. S’il se pratique en extérieur dès le XIVe siècle, en particulier pour le petit peuple, les nobles s’y exercent dans des salles couvertes (les « tripots ») bordés de galeries abritant les spectateurs. Déployant des trésors d’agilité, les meilleurs sportifs sont acclamés par un public en délire… De là provient l’expression « épater la galerie » qui avec l’usage deviendra plus péjorative, synonyme de fanfaronnade et de manque d’humilité.

FAIRE AMENDE HONORABLE > Reconnaître ses torts

Avant d’être employée au sens figuré, l’amende honorable constitue, sous l’Ancien Régime, une sanction juridique par laquelle le coupable doit reconnaître publiquement ses fautes. Agenouillé devant un parterre de laïcs et d’ecclésiastiques, souvent vêtu d’une simple chemise et pieds nus, le condamné demande pardon « à Dieu, à la société et aux hommes ». La cérémonie, volontairement humiliante, est censée rendre à l’accusé son honneur bafoué. Souvent mobilisée pour des délits mineurs (insultes, impudeurs), elle précède aussi la condamnation à mort des criminels de sang. Ainsi les futurs pendus délivrent leur « amende honorable » au pied de l’échafaud, la corde passée autour du cou !

JEU DE MAINS, JEU DE VILAINS > Les chamailleries finissent par des coups

Rouillé à force d’être employé en marge des cours de récréation, ce proverbe tire son origine du Moyen Âge. A l’époque, le terme « vilain » désigne les personnes de basse extraction, souvent associées à la ruralité et au travail manuel, dont les chamailleries peuvent rapidement s’envenimer. En outre, le port d’arme leur étant défendu, c’est souvent à coup de poings qu’ils règlent leurs querelles… Une autre explication se rapporte au jeu de paume. Les « vilains » n’ont pas le loisir d’y jouer avec des raquettes, plébiscitées par la noblesse, mais le pratiquent en extérieur avec le plat de la main. Un comble pour les aristocrates qui les enferment dans ce proverbe méprisant, défendant leur progéniture de faire de même… Surtout que les parties de ces rustres peuvent rapidement dégénérer en pugilat !

UN JEU DE MOTS. Tomber à pic, prendre la balle au bond, « qui va à la chasse perd sa place », rester sur le carreau… Autant d’expressions issues du jeu de paume, sport extrêmement populaire de l’Ancien Régime pratiqué par toutes les couches sociales. (Credit: Sur la touche)

JURER COMME UN TEMPLIER > Être grossier, blasphémer

Si on lui préfère aujourd’hui la formule « jurer comme un charretier », les conducteurs de char ayant l’habitude d’exciter leur monture en l’accablant d’insultes, l’expression gagne à être connue tant elle ruisselle d’histoire… Au XIIIe siècle, l’ordre des Templiers n’a pas bonne presse. Cette milice de moines-chevaliers s’était distinguée pendant les Croisades, mais depuis quelques temps, on la dit réfugiée dans la finance, le luxe et la débauche. En France se répandent les expressions « boire comme un Templier » et « jurer comme un Templier », représentatives de leurs excès et de leurs vices… Car en parallèle, la propagande royale s’est organisée. En 1307, Philippe le Bel fait arrêter les Templiers et confisquer leurs biens, les accusant de nombreux crimes (dont le blasphème) qu’ils ne tardent pas à avouer sous la torture. Cette condamnation injuste entretiendra la légende de chevaliers impies dans le parler français du XIVe siècle, où fleuriront ces expressions imagées.

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L’ARGENT N’A PAS D’ODEUR > Tout argent, même mal acquis, est bon à prendre

La formule originale est en latin : pecunia non olet. On la doit à l’empereur romain Vespasien qui, au Ier siècle, met en place une série d’impôts afin de renflouer les caisses de l’Empire siphonnées par Néron, son prédécesseur. Le Romain prélève notamment une taxe sur l’urine, liquide très prisé des teinturiers antiques, ce qui lui vaut quelques quolibets. Titus, son propre fils, lui fait remarquer qu’il trouve cette mesure avilissante. Selon Suétone, l’empereur « lui mit sous le nez le premier argent qu’il perçut de cet impôt, et lui demanda s’il sentait mauvais ». Non : qu’elle que soit sa provenance, l’argent n’a pas d’odeur… C’est en souvenir de son investissement dans « l’or jaune » que les urinoirs publics seront nommés en son honneur vespasiennes.

OR JAUNE. Collectée dans des cuves placées sous les toilettes antiques ou en pleine rue, l’urine est utilisée en teinturerie pour débarrasser les étoffes de leurs impuretés. Elle sert également aux diagnostics des médecins médiévaux, qui associent sa couleur (ou son goût !) à « l’humeur » de leurs patients. (Credit: ResearchGate)

LIMOGER > Licencier, disgracier, exclure

Quel rapport entre un licenciement et la capitale historique de la porcelaine ? Le lien s’établit en août 1914, dans les premières semaines de la Grande Guerre. L’armée allemande a pris le meilleur sur ses adversaires, massés sur la frontière, en les contournant par la Belgique et le Luxembourg. La débâcle est totale : côté français, on a essuyé plus de 75 000 pertes en Alsace-Lorraine… Le général Joffre, scandalisé par l’incompétence de certains officiers, obtient de pouvoir les réaffecter à sa guise. Il procède à une véritable purge : près de 40% des gradés sont déchus de leur commandement et envoyés à l’arrière, notamment dans la région de Limoges ! Depuis lors, « être envoyé à Limoges » ou « se faire limoger » signifie être renvoyé, exclu ou privé de son commandement.

METTRE SA MAIN AU FEU > Affirmer avec certitude

Que l’on mette sa main au feu ou à couper, on veut dire la même chose : je suis sûr de moi, j’ai pleinement confiance en ce que j’affirme ! Cette formule nous vient du Moyen Âge, et plus particulièrement d’un procédé judiciaire qui fait loi – l’ordalie ou « jugement de Dieu ». A l’époque, les crimes ne sont pas suivis d’enquêtes poussées : seul juge des affaires des hommes, Dieu distille peines et châtiments. Pour rendre sa volonté plus explicite, les tribunaux médiévaux introduisent l’ordalie, une épreuve censée départager coupables et innocents. Les suspects doivent notamment porter, sur une dizaine de pas, une barre métallique chauffée au fer rouge : si, trois jours plus tard, la main brûlée a cicatrisé, son propriétaire est déclaré blanchi. Inutile de préciser que les ordalies ont jeté un certain nombre d’innocents dans les cachots du Moyen Âge…

MAIN INNOCENTE. L’ordalie par le feu est une des méthodes les plus populaires du Moyen Âge pour départager coupables et innocents. Fort heureusement, son utilisation est ralentie à partir de 1258 sous l’impulsion du roi Saint Louis, qui lui préfère les serments purgatoires – autrement dit, jurer sur un livre saint. (Credit: Wikimedia/Domaine public)

MORT AUX VACHES ! > Cri de ralliement antimilitariste et anti-policier

Que viennent faire les sympathiques ruminants de nos campagnes dans cette formule au vitriol ? Rien, si ce n’est un défaut de prononciation. En 1870, la France et la Prusse se livrent une guerre sans merci. Aux postes-frontières, les sentinelles allemandes sont plantées sous un écriteau qui indique Wache, soit « garde » dans la langue de Goethe. A défaut de le prononcer correctement (en allemand, le mot se lit va-reu), le peuple français s’empare du terme pour en faire un cri de ralliement germanophobe : « mort aux vaches » résonne bientôt dans les faubourgs assiégés ! L’expression garde sa popularité au XXe siècle, quoique tournée vers une nouvelle cible : les policiers qui, des vaches aux poulets, ne quittent jamais la ferme dans l’argot populaire…

PAYER EN MONNAIE DE SINGE > Arnaquer, duper, payer en fausse monnaie

En vertu d’un règlement édicté au XIIIe siècle sous Louis IX, il faut se fendre d’un droit de passage pour traverser le Petit-Pont et gagner l’Île de la Cité, à Paris. Tous, artisans comme commerçants, doivent s’y soumettre. A une exception près : les jongleurs, troubadours et autres « montreurs de curiosités » peuvent s’en affranchir en contrepartie d’un bon tour exercé par leurs singes. Si le péager s’estime satisfait du numéro, il les laisse passer sans réclamer son dû… Les grimaces, pirouettes et pitreries de ces animaux malicieux font ainsi office de monnaie d’échange, prenant plus tard le sens figuré de fausses promesses ou de mensonges. Aujourd’hui encore, les bêtises enfantines ne sont-elles pas qualifiées de « singeries » ?

SINGERIES. Le singe est une créature ambivalente du bestiaire médiéval : associé au Diable pour ses pitreries, il est aussi apprécié des jongleurs et des artistes de foire. Illustration extraite du Missel d’Attavente, XVe siècle. (Credit: HALSHS/Domaine public)

QUARANTAINE > Isolement, mise à l’écart

La première mention du terme se retrouve dans la « quarantaine-le-roi », une mesure mise en place par Philippe Auguste au XIIIe siècle instaurant un délai obligatoire de quarante jours avant de se venger d’une offense… L’idée était de décourager les guerres privées dans un territoire encore juridiquement hétérogène. Mais la quarantaine va prendre un tout autre sens au siècle suivant. En 1348, au plus fort de la Peste Noire, la cité de Venise instaure un délai de quarante jours (quaranta giorni) avant que les navires marchands qui viennent d’y accoster ne puissent débarquer marchandises et équipage. Sage manœuvre : c’est dans la cale de navires génois que les rats infectés ont débarqué en Europe… Peu appliquées, ces procédures sanitaires n’empêcheront pas la démographie continentale d’encaisser un sérieux coup de faucille : plus de cent millions de victimes, soit un tiers de la population européenne.

SUR LA SELLETTE > Soupçonné, exposé à la critique

Quiconque est « sur la sellette » est exposé au feu des critiques, placé dans une situation délicate où il risque gros. Le terme s’applique aussi bien au PDG coupable de malversations qu’au sportif interrogé dans la foulée d’un match calamiteux… Mais l’origine de l’expression est bien plus ancienne : sous l’Ancien Régime, la sellette est un tabouret de bois très bas sur lequel on assoit l’accusé lors d’un procès. Dans cette position d’infériorité, forcément humiliante, l’individu sent peser sur lui le regard de ses juges : pressé de questions, il ne tardera pas à avouer ses méfaits ! Supplantée à la Révolution par le banc des accusés, plus républicain, la sellette survivra malgré tout dans la langue française.

TOMBER COMME À GRAVELOTTE > Pleuvoir fortement

Personne n’ignore que l’on fait référence à la pluie lorsque l’on dit qu’il « tombe comme à Gravelotte ». Mais à quel événement historique cette expression se rapporte-t-elle ? Tout simplement, à un déluge de fer… Le 18 août 1870, en pleine guerre franco-prussienne, les belligérants s’affrontent dans la commune de Gravelotte, à quelques kilomètres à l’ouest de Metz. Sous un ciel plombé, 700 obusiers allemands rivalisent avec 500 canons français, donnant l’impression d’une pluie ininterrompue de mitraille. Pilonné par l’artillerie ennemie, chaque camp essuie des pertes effroyables : après plus de quatorze heures de combats, on déplore plus de 6 000 morts et 25 000 blessés ou disparus… Ce sont donc non seulement les obus, mais aussi les soldats qui sont largement « tombés » à Gravelotte.

APRÈS LE DÉLUGE. Ce tableau d’Alphonse de Neuville, présenté en 1881, représente les soldats français, reconnaissables à leurs pantalons rouges, dans le cimetière de Saint-Privat. (Credit: Wikipedia/Domaine public)

VOUER AUX GÉMONIES > Livrer au mépris public, accabler

Dans l’Antiquité romaine, l’escalier des Gémonies (scalae gemoniae, littéralement « l’escalier des gémissements ») est une rampe située près du Capitole de Rome, en surplomb du forum où passe un flot continu de riverains. C’est ici que l’on expose, après les avoir tirés de prison puis soumis à de nombreux sévices, les corps des condamnés à mort… Une exhibition funèbre qui tient lieu d’avertissement ! Quelques jours plus tard, les dépouilles sont saisies par les crocs des bourreaux et jetées dans le Tibre (sort que l’on réserve notamment à l’empereur Vitellius, en 69). Depuis, l’expression est passée dans le langage figuré pour désigner l’acte d’humilier publiquement quelqu’un.


Bibliographie

  • Carine Girac-Marinier, Les expressions et proverbes disparus de Pierre Larousse, 2020, Larousse.
  • Didier Chirat, Surprenant Moyen Âge ! 2020, Larousse.
  • Blog « Origine des mots » du Projet Voltaire
  • Rubrique « Le mot juste » du magazine Historia

Cover picture: Adolph Northen’s Frozen Napoleon (Public Domain) – Montage by The Storyteller’s Hat (c).